Une légende du XIIIe siècle mentionne que les premiers moines qui arrivèrent à Tyniec venaient de Cluny. Le jeune prince Casimir devait y devenir moine mais le quitta grâce à une dispense papale pour accéder au trône de Pologne. Il emmena avec lui les premiers douze moines à Tyniec. Avec la permission de l'abbé Odilon, il fonda un monastère pour eux sur le rocher de Tyniec en 1044... Il faut néanmoins ajouter qu'au-delà de cette légende existe un lien entre Cluny et Tyniec dès le premier siècle de son existence, par le cardinal Gilles de Tusculum, d'abord moine clunisien avant de devenir cardinal, auteur de la Vie d'Hugues de Semur.
Comme légat du pape, il est l'auteur du premier document connu relatif à Tyniec et peut en avoir consacré la première église abbatiale vers 1124. Les moines de Tyniec s'appuient avec énergie sur la légende clunisienne : en 1597, l'abbé de Tyniec Mikolaj Miedecki rapporte de Cluny une copie de son coutumier et plaçant une image de l'abbé Pierre le Vénérable dans les stalles de Tyniec. Ils ajoutèrent la formule sub congregatione Cluniacensi ("sous la congrégation de Cluny") à leurs voeux. Toutes ces aspirations sont couronnées de succès par l'intégration officielle de Tyniec dans la congrégation de Cluny, confirmée par une lettre de l'abbé de Cluny Henri-Osvald de la Tour d'Auvergne, le 27 janvier 1729, invitant les moines de Tyniec à se rendre à un chapitre général et ordonnant l'élection du président de la province de Pologne. La légende médiévale eut une vie si longue qu'elle fut une référence dans la recherche de l'identité monastique de Tyniec. Dans un sens, elle survivra à la dissolution des deux abbayes : de Cluny en 1790 et de Tyniec en 1816. Jusqu'au début du XXe siècle, la légende soutenait l'idée des moines revenant sur la roche de la rivière Vistule.
Habent sua fata fabulae. Bien que les gens qui crurent à cette légende soient morts, bien que la splendeur du passé ne soit plus, il reste des traces de ces idées passées : des inscriptions, des documents, l'image de Pierre le Vénérable dans les stalles.