Selon la tradition locale, le moine milanais Gérard, en provenance de Cluny, s’arrête en 1084 à Vertemate, entre Côme et Milan. Il est envoyé en Lombardie par l’abbé Hugues pour étendre l’influence de Cluny en Italie. De nombreuses personnes du village et de ses alentours lui donnent des terres désertes et marécageuses, afin d’y fonder un monastère, sur l’emplacement d’un plus ancien monasterium Santae Cruxis. En 1086, l’abbé Hugues y séjourne et, neuf ans plus tard, c’est le pape Urbain II qui s’y arrête. Le prieuré, dédié à Jean-Baptiste, est en plein essor : il possède des dépendances, parmi lesquels le célèbre monastère féminin de Cernobbio, et tient un rôle majeur dans la politique de l’Ecclesia cluniacensis en Lombardie. Mais en 1287, les moines, face aux luttes opposant Côme à Milan, prennent partie pour les Milanais. En représailles, les Cômasques détruisent le cloître du prieuré et ses murs de clôture. Mais les moines de Vertemate réussissent, bien qu’en nombre réduit, à reconstruire leur monastère. En 1378, lors du Schisme d’Occident, le prieuré se sépare de Cluny, après 294 ans d’histoire commune.
Une remarquable influence bourguignonne
Le prieuré se dresse sur un coteau boisé, dominant la vallée du Seveso, le long de la route qui reliait Milan à Côme. L’église comprend trois vaisseaux, dont le central est couvert d’une charpente. On y accède par un portail qui, jusqu’au XVIe s., était précédé d’un porche ; au-dessus de la porte, les armes du dernier prieur commendataire (XVIIIe s.). La nef, dont les piliers surmontés de chapiteaux cubiques soutiennent des arcs en plein cintre (XIe s.), conduit à des absides voûtées en cul-de-four. Le chœur abrite des fresques du XVe s. Celles de l’absidiole nord, qui viennent d’être restaurées, sont d’une valeur artistique supérieure : on les attribue à des maîtres de l’école de Giotto (1350-1375). Le cloître, détruit en 1287, fut reconstruit au XXe s. en béton. Restent des bâtiments conventuels l’ancienne conciergerie (XVIIIe s.) ainsi que l’hospice (ou pharmacie du XVIe s. ?). A proximité se trouve une tour de défense romaine, seul souvenir du castrum donné à Cluny avec l’église Sainte-Croix.